Des démons. Tout le monde en avait, des démons. De ces images, de ces pensées qui, une fois qu'elles vous on trouvées refusent de vous laisser. Des songes qui vous harcèlent jour et nuit - mais surtout nuit - et qui refusent de vous laisser en paix, peu importe les efforts que vous faîtes pour vous en débarasser... Certains en avaient de bien moins terribles que d'autres, qui se taisaient lorsqu'ils avaient l'esprit occupé ou qu'ils n'y pensaient pas, qui préféraient s'éloigner pour revenir parfois titiller une conscience ou un inconscient profondément enfouit. Et il y en avait d'autres, bien plus terribles, qui ne vous lâchent jamais. De ces rêves terribles qui vous reviennent sans cesse en mémoire. Des remords, qui tentaient de vous faire regretter vos actes passés, de mauvais souvenirs, qui ne cessaient de vous rappeler tout les choses plus ou moins terribles qui avaient pu vous arriver... Et ceux... Ceux qui marquaient votre existence absolument tout le temps. Ceux dont la présence n'était même pas oubliable un seul instant. La perte d'un être cher, que vous ressentiez tous les jours, dans toute leur ampleur, par le vide à vos côtés de celui qui aurait dû occuper une place qui vous était chère... Ce soir-là, elle ne trouvait pas le sommeil. La pensionnaire, allongée sur le dos, aussi blanche que les draps de son lit.
*J'en peux plus. Ca ne sert à rien. Je n'arriverais pas à dormir...*
Décida-t-elle soudain. Elle n'en pouvait plus. Il fallait qu'elle sorte de ce pensionnat emplit de souvenirs, qu'elle s'éloigne. Elle avait besoin de s'éloigner, de respirer... De réfléchir, et peut-être même d'oublier... Même si, contraîrement aux autres enfants, elle n'avait pas la faculté d'oublier ce qu'elle voulait oublier. Au contraîre, plus un évènement était terrible pour elle, plus elle s'en rappelait longtemps… Maeko sortit soudain de son lit, puis elle se dirigea vers la porte du dortoir. Elle n'avait pas pris la peine de se déshabiller pour se mettre au lit... Elle était habillée d’un pantalon noir large, d’un t-shirt noir. Après tout, si elle se faisait chopper, il valait mieux qu'on ne l'identifie pas tout de suite... En quelques secondes, elle eut dévalé l'escalier sur la pointe des pieds, puis elle traversa les couloirs. Quelques instants plus tard, elle fut dans le hall d'entrée, l'oreille tendue, les yeux furetant absolument partout. Elle contourna les portes du restaurant et tomba sur une salle de classe désafectée dont la porte et la fenêtre étaient ouvertes. Elle se glissa par cette dernière avec des gestes fluides et se dirigea vers le lourd portail de fer.
Elle ne sut combien de temps elle marcha. Toujours était-il que ses pas la menère, totalement par hasard, à la foret. Elle passa la lisière d'un pas rapide et qu'elle déambula dans les allées un peu broussailleuse. La tranquilité de l'endroit, malgré son légèrement morbide, l'appaisa un peu et, elle put faire de plus grands pas et respirer plus profondément. Elle sentit un mouvement, qui perça aussi clairement que la lame d'un couteau l'immobilité totale du lieu. Intriguée, se demandant bien qui pouvait bien être aussi taré qu'elle pour se promener dans un endroit pareil à une heure pareille...
Après avoir tourné au coin d'une allée, elle vit deux silhouettes. Un très mauvais pressentiment saisit Maeko et elle se demanda l'espace d'un très infime instant si elle ne devait pas faire demi-tour...